• La confiance

    "Vous pouvez me faire confiance", "De toute façon, on ne peut pas travailler ensemble sans confiance", "Je vais devoir faire confiance à mon AMA pour lui laisser mon enfant, forcément"...

    Ce sont des phrases que l'on prononce, parfois sans y penser, comme un réflexe.

    Mais la confiance, tout merveilleux que cela puisse être, cela se construit, cela se mûrit.

    Soyons sérieux deux minutes : qui est en droit d'exiger d'un parent, suite à un entretien d'une heure ou deux, qu'il vous fasse confiance? Personne.

    Qui est capable, au sortir d'une nouvelle ou d'une première maternité, de faire confiance au point de confier la prunelle de ses yeux à une quasi-inconnue rencontrée une semaine plus tôt, toute professionnelle qu'elle soit? Personne.

    Votre denstiste a beau être diplômé, fort d'une expérience de 20 années de pratique, d'une gentillesse à toute épreuve, vous serez toujours stressé(e) à l'idée de vous retrouver sous la lampe cruelle de son fauteuil d'examen.

    Alors non, je ne vous demande pas me faire confiance. C'est à moi, au cours de mon travail, au fil des jours, des mois, de vous prouver que cette confiance est apte à se construire, comme un processus lent et complexe, imperceptible, solidement tissé en arrière-plan du temps qui passe.

    La confiance, elle se mûrit, elle grandit, elle évolue, parfois elle ne vient pas. Et jamais, au grand jamais, une AMA est en droit d'exiger une confiance totale, absolue. Notre métier consiste également à vous prouver que nous sommes des professionnelles, par un positionnement clair et cadré allant dans ce sens : j'aurais personnellement plus tendance à accorder ma confiance à une AMA qui est dans la capacité de dire "non" à certaines demandes, qui argumente, qui priviliégie le bien-être de l'enfant au détriment de son "capital sympathie" (exemple? Ceci) qu'une AMA qui dit oui à tout, se positionne sans cesse dans l'affect, l'empathie voire la sympathie (attention, je ne suis pas un monstre aimable comme une porte à clous, soyons clairs ).

    Dure réalité de notre profession : entourer l'enfant de notre affection tout en gardant un détachement vis à vis de lui, privilégier les relations cordiales et saines avec les parents sans tomber dans la franche camaraderie, être arrangeante sans devenir esclave de sa peur de décevoir, remplir son rôle de conseil sans verser dans la condescendance, s'organiser, faire preuve de bon sens et de vigileance, taire son instinct de mère pour faire place à ses compétences de professionnelle. 

    Je considère un contrat comme un "partenariat" : les parents et moi allons oeuvrer dans le même sens, former une team de choc dans un but commun : le bien-être de l'enfant. A nous de garder notre place, notre rôle, composer avec nos identités respectives, échanger, communiquer, transmettre, travailler ensemble, se respecter.

    C'est peut-être tout cela, finalement, qui construit peu à peu la confiance.

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